Si vous vivez en Afrique, il vous est sûrement arrivé de tomber sur des cas de cancers à des stades très avancés. Sur les réseaux sociaux le partage d’images ou de vidéos mettant en scène des personnes à l’agonie, présentant « une monstruosité » liée à un cancer est monnaie courante. On observe sur la toile des initiatives individuelles très souvent désespérées d’appels aux dons. Comment en arrive-t-on là ? Dans cet article nous vous apportons des éléments de réponses.
1- L’ignorance
Le niveau d’éducation a un impact sur la santé de tout individu, cela ne fait aucun doute. (Lire notre tribune l’éducation pour améliorer la santé des populations africaines) Par définition le cancer est l’apparition rapide de cellules anormales qui se multiplient de manière anarchique dans une partie de l’organisme. Augmentation de volume subite d’une partie du corps (cou, membre ou abdomen…), pertes de sang inhabituelles (par le vagin ou l’anus par exemple), anémie permanente ou manque de sang inexpliqué, changement localisé de la coloration de la peau, sont des signes d’alerte qui ont été parfois négligés. Fréquemment, c’est face à la gravité des signes que les patient(e)s décident de consulter un médecin qui ne pourra que faire le constat des complications et instituer un traitement palliatif.
« Plus tôt un cancer est diagnostiqué, plus il y a de chance de guérison. On gagne toujours à s’informer du moindre signe ou symptôme récurrent dont on ignore l’origine ».
Lire notre article : Comment éviter le cancer aux femmes dans la teinture artisanale des pagnes
2- Le charlatanisme
Pasteurs d’église, tradithérapeutes, voyants, pratiquants de médecine alternative et autres charlatans n’hésitent pas à abuser de la confiance de personnes souffrant de cancers, occasionnant ainsi d’énormes retards dans leur prise en charge. Ils proposent de l’exorcisme ou possèdent le remède miracle qui guérit le cancer. Les patients obnubilés par la recherche de la solution miracle, ont parfois du mal à admettre que cela n’a pas marché. Très souvent « frappés » par un sentiment de culpabilité, ces derniers (fortunés ou non) dénoncent rarement les auteurs d’arnaques du genre, qui au-delà de les dépouiller sur le plan financier, anéantissent complètement tout espoir de guérison de ceux-ci.
Les victimes gagneraient à dénoncer ces pratiques afin que d’autres patients cancéreux ne subissent les mêmes désagréments.
Lire notre article L’Afrique : eldorado des produits naturels à base de plantes médicinales
3- L’absence de compétences et d’organisation
Les sociétés savantes dans le domaine de l’oncologie ou de la cancérologie sont inexistantes dans plusieurs pays africains. Y’a-t-il suffisamment de médecins ou de soignants dans le domaine afin de pouvoir s’organiser en société ? La question mérite réflexion. Au-delà du manque de spécialistes, c’est parfois l’esprit d’équipe et d’humanisme qui fait défaut au sein de la population des soignants. Etablir un parcours du patient cancéreux en collaboration avec les autorités compétentes nous semble le point de départ de toute stratégie qui se veut efficace ; et ceci peu importe les moyens financiers à disposition. Cela est une nécessité et est indispensable dans tout système de santé. Les intervenants dans le parcours du patient cancéreux gagneraient à mutualiser leurs efforts.
« Le retard de prise en charge est certain lorsqu’un patient ne sait où aller et lorsqu’un médecin ne sait à qui adresser un patient »
Lire sur notre site L’Afrique face aux cancers : explications du « boom » et moyens de prévention
4 – La pauvreté
La pauvreté est responsable de l’absence de soins et par conséquent de nombreux décès en Afrique, où la famille demeure le principal soutien en cas de maladie grave. Le modernisme n’a pas fait disparaître cette entraide et cette solidarité culturelle qui existe depuis la nuit des temps. Les plus nantis accompagnent les plus démunis. Mais lorsqu’il s’agit des cancers, les capacités financières et les ressources morales peuvent devenir très vite insuffisantes. Les personnes porteuses de cancer se retrouvent en général brutalement abandonnées à leur propre sort. De plus en plus d’âmes de bonne volonté essaient tant bien que mal de venir en aide aux personnes porteuses de cancers en Afrique ; ceci à travers des ONG.
Mutualiser les efforts des ONG reconnues intervenant dans la prise en charge de patients cancéreux nous parait plus efficace. En Côte d’Ivoire il existe une liste d’ONG affiliées au programme national de lutte contre le cancer (PNLCA).
Source serviceongsante.ci
5- La faiblesse des systèmes de santé
Les insuffisances des systèmes de santé africains sont bien connues. Cependant, aucune action pérenne ne peut se faire sans l’appui des gouvernements. Il est grand temps que les états africains accordent de l’importance à la question des cancers ; la question est politique est-on tenté de dire. La formation et l’affectation dans toutes les régions de médecins référents pour les dépistages de cancers nous paraît être une nécessité. Prélèvement des patients et acheminement vers les centres appropriés dans les grandes villes est une alternative qu’il faut encourager et encadrer. La création de centres de prise en charge des cancers est l’idéal.
Certains pays en Afrique au sud du Sahara comme le Rwanda montrent déjà la voie. Le Rwanda Cancer Centre inauguré par le Président Paul Kagame, le jour même de la journée mondiale du cancer le 04 février 2020, permettra de réduire la mortalité par cancer, de réaliser la prévention et la détection précoce des cancers entre autres…
Source WHO Africa, afro.who.int
Des efforts doivent être fournis à tous les niveaux, les retards de prise en charge des cancers ne relèvent pas juste de la responsabilité des gouvernements. Il est aujourd’hui primordial de sensibiliser massivement les populations africaines sur la question des cancers.