L’usage de pesticides est de plus en plus répandu en Afrique. La volonté d’industrialiser les productions agricoles et de maximiser les profits n’y est pas étrangère. Qu’est-ce qu’un pesticide ? Quels sont les types de pesticides ? Qu’entend-t-on par agriculture biologique ? Pourquoi manger bio en Afrique sera bientôt un luxe ? Quels sont les risques encourus lorsqu’on fait usage de pesticides ? Comment réduire l’impact des pesticides sur notre santé au quotidien ?
Qu’est-ce qu’un pesticide ?
On appelle pesticides des substances utilisées en agriculture, généralement pour lutter contre des organismes nuisibles aux cultures.
Quels sont les types de pesticides ?
On peut classer les pesticides en 4 grands groupes :
- Les herbicides destinés à tuer les mauvaises herbes qui étouffent les végétaux d’intérêt
- Les insecticides destinés à éliminer les insectes qui se nourrissent ou pondent sur les cultures
- Les fongicides qui tuent les champignons microscopiques responsables de la pourriture
- Les parasiticides qui tuent les vers parasites
Tous les pesticides sont composés d’un ou plusieurs principes actifs, d’origine naturelle ou synthétique auxquels sont ajoutées d’autres substances (solvants, mouillants, colorants, répulsifs…) afin d’améliorer leur efficacité et de faciliter leur emploi. La substance active (molécule) constitue le principe actif (celui qui agit sur les nuisibles) du produit. On peut estimer qu’aujourd’hui environ 800 substances actives sont utilisées par les agriculteurs dans les différents pays du monde… [1,2]
Qu’entend-t-on par agriculture biologique ?
L’agriculture biologique est une méthode de culture qui n’utilise pas de pesticides ou d’engrais chimiques, et qui les remplaces par d’autres méthodes incluant des produits issus des plantes ou des animaux. [3]
Pourquoi manger bio en Afrique sera bientôt un luxe ?
Acheter de la banane ou tout autre fruit à un(e) commerçant(e) en bordure de route est un geste banal du quotidien en Afrique, tant les populations dépendent des activités agricoles, pratiquées sur des terres et utilisant des méthodes ancestrales transmises de génération en génération. Ce geste banal commence de plus en plus à susciter des interrogations telle que « quelles sont les conditions de culture de cette banane ou ces fruits » ? L’Afrique aujourd’hui ne représente encore que 2% du marché mondial des pesticides. Le continent est moins investi par les géants du secteur agrochimique du fait de la prédominance d’une agriculture familiale, représentant quelques 80% de sa production. Mais il est devenu une cible prioritaire pour Syngenta (firme qui se réclame comme leader des pesticides et semences potagères en Afrique) qui veut y être pionnier et dominant. Le recours aux pesticides pour lutter contre les différentes maladies menaçant les récoltes remonte à l’époque coloniale et au développement des plantations. Mais la généralisation aux petits paysans est en revanche bien plus récente. Tous les chiffres officiels, dont ceux publiés par les Nations unies, indiquent une augmentation importante de l’usage de pesticides et ils ne reflètent qu’une partie de la réalité. [4,5] De nos jours, dans les pays industrialisés, les agriculteurs dit « bio » sont regroupés en fédérations avec des cahiers des charges à respecter pour l’obtention de label (label biologique, AB) qui comprennent en général :
- Utilisation de produits (engrais) aux origines naturelles
- Interdiction, sauf exception, d’intrants d’origine chimiques
- Rotation modérée des cultures, élevage peu intensif, etc. de façon à préserver les sols (reconstitution naturelle) [6]
On peut donc comprendre que manger bio dans les pays industrialisés revient à consommer ce que « les institutions » ont autorisé, ou alors ce qu’elles estiment ne pas être dangereux pour la santé. Si l’usage des pesticides dangereux continue de se répandre, les agriculteurs africains probablement copieront le modèle des agriculteurs bio des pays industrialisés.
Quels sont les risques encourus lorsqu’on fait usage des pesticides ?
Chez les professionnels, l’utilisation, le stockage et la manipulation dangereux des pesticides sont les principales causes d’intoxication aigue. Selon l’OMS, dans les pays en développement l’incidence réelle des intoxications aux pesticides est difficile à évaluer, mais on suppose qu’elle est élevée. Un grand nombre d’enfants et d’adolescents qui travaillent dans l’agriculture sont exposés aux pesticides. L’utilisation peu ou pas contrôlée des pesticides en Afrique soulève des inquiétudes croissantes avec la multiplication de maladies non transmissibles- cancers, malformations congénitales, troubles neurologiques, diabète – dont ces substances chimiques peuvent être l’une des causes. [7,8] Les sols et nappes d’eau phréatiques sont contaminés pour plusieurs décennies après usage de ces pesticides dangereux.
Comment peut-on réduire l’impact des pesticides sur notre santé au quotidien ?
Pour les professionnels de l’agriculture :
- Ne pas acheter de pesticides qui n’ont pas de notice d’utilisation
- Se procurer la liste des pesticides interdits par la réglementation en vigueur dans le pays
- Se protéger en portant des gants et des masques faciaux au cours de l’utilisation
- Se renseigner auprès des autorités compétentes sur les entreprises homologuées dans la fourniture des pesticides
- Eviter d’utiliser les pesticides lorsqu’on est enceinte
Pour les populations :
- Laver et peler les fruits et légumes permet de réduire l’ingestion des résidus de pesticides,
- Tremper les fruits et légumes dans de l’eau tiède (presque froide pour éviter de dénaturer la qualité des aliments, notamment le goût et la saveur) mélangée à de la cendre et 1 morceau de charbon de bois pendant 30 minutes environ
- Tremper les fruits et légumes dans de l’eau tiède mélangée à du bicarbonate de soude et un morceau charbon de bois pendant 30 minutes
- Ne pas hésiter de se renseigner sur les conditions de culture des aliments que nous consommons lorsque cela est possible
- Créer son propre verger ou potager lorsqu’on a « la main verte » ou alors apprendre pourquoi pas à le faire
A-t-on besoin d’un procès tel que celui opposant un jardinier américain au géant mondial Mosanto (ce dernier attribue son cancer à un herbicide Roundup fabriqué par Mosanto) [9] ou alors un scandale sanitaire tel que celui des Antilles où un pesticide ultra-toxique (le chlordécone) a été utilisé pendant plus de 20 ans dans les bananeraies en Guadeloupe et en Martinique ? [10] Le reportage diffusé par France 2 (télévision française) mercredi 18 septembre 2013, intitulé « Cameroun : la banane de la répression et de la mort » dans le cadre de l’émission « CASH INVESTIGATION », n’a peut-être pas été exploité à sa juste valeur. [11] Les campagnes de prévention à l’usage des pesticides dangereux sont quasiment inexistantes sur le continent, est-ce un sujet tabou pour les gouvernements africains ? Il est important de prendre la mesure et l’ampleur du problème, d’établir des réglementations et surtout de les divulguer au plus grands nombre afin de réduire l’impact qu’ont les pesticides dangereux sur notre environnement et notre santé.
REFERENCES
[1] https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/agriculture-pesticide-9169/
[2] https://www.universalis.fr/encyclopedie/pesticides/3-les-differentes-familles-de-pesticides/
[3] https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/developpement-durable-agriculture-biologique-5413/
[4] https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/07/02/il-faut-interdire-immediatement-les-pesticides-les-plus-dangereux-en-afrique_5484430_3212.html
[5] https://www.jeuneafrique.com/mag/611573/economie/semences-et-pesticides-lafrique-dans-le-viseur-de-syngenta/
[6] https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/agriculture_biologique.php4
[7] https://www.who.int/ceh/risks/cehchemicals2/fr/index1.html
[8] https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/07/02/il-faut-interdire-immediatement-les-pesticides-les-plus-dangereux-en-afrique_5484430_3212.html
[9] http://www.lefigaro.fr/international/2018/11/01/01003-20181101ARTFIG00143-proces-roundup-le-jardinier-atteint-d-un-cancer-accepte-de-reduire-ses-dommages-et-interets.php
[10] https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/06/06/scandale-sanitaire-aux-antilles-qu-est-ce-que-le-chlordecone_5310485_3244.html
[11] http://plus.lefigaro.fr/note/cameroun-la-banane-de-la-repression-et-de-la-mort-20130919-2529451