PPH : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs . trices , et nous dire ce qu’est la drépanocytose ?
Je m’appelle Karidja et j’ai 36 ans. Je suis atteinte de la drépanocytose S/C. En 2 mots, cette maladie est la maladie génétique la plus répandue au monde. Elle atteint les globules rouges qui se « déforment » en cas de crises. De base le globule rouge est sphérique et souple. Avec la drépanocytose, celui-ci peut changer sa structure et texture pour se mettre en forme de « haricot » et devenir fibreux (= dur) et éclater (hémolyse); ce qui rend la circulation sanguine difficile et peut causer des complications graves.
PPH : Qui peut être atteint de drépanocytose ?
N’importe qui je dirais ! Puisqu’il suffit que les 2 parents soient porteurs sains (AS) pour transmettre leurs « S », globule rouge malade à leur enfant. Oui l’hémoglobine dite normale s’appelle AA, dans la drépanocytose l’hémoglobine peut s’appeler : SS – SC – SE – SBT…Il y a plusieurs combinaisons possibles. Ce qu’il y a à retenir, c’est que tant qu’il y a un S des douleurs et complications peuvent se manifester. J’ai envie de dire que même si la maladie a été découverte en Inde – Au Brésil – En Afrique (dans les populations dites « noires ») aujourd’hui tu peux être blonde aux yeux bleus et être atteinte de la drépanocytose grâce au brassage culturel et aux flux migratoires.
PPH : Comment se manifeste la drépanocytose ?
J’ai envie de dire qu’il y a autant de manifestations possibles que de patients atteints. C’est d’ailleurs ce qui complique la prise en charge. Par contre ce que je pourrais mettre en avant c’est qu’en cas de manque d’oxygène dans le sang, dû à un effort quelconque : la marche – la course… dû à un changement de température : trop chaud – trop froid… Les douleurs arrivent : on appelle cela des Crises Vaso-Occlusives (CVO). En fonction de comment elles sont gérées elles peuvent rester au stade de douleurs intenses ou évoluer vers des complications. Oui, les manifestations principales de la drépanocytose : ce sont les douleurs intenses – une fatigue importante (soudaine) – des yeux jaunes (si il y a une trop grosse destruction massive des globules rouges)…
PPH : Quelles peuvent en être les complications ?
Elles sont nombreuses, parmi elles on peut citer : l’accident vasculaire cérébral, l’infarctus du myocarde, le syndrome thoracique aiguë, l’anémie sévère etc.
PPH : Comment savoir si on est atteint de drépanocytose?
Alors la meilleure chose à faire pour en avoir le cœur net, c’est une électrophorèse. Cet examen sert à détecter les anomalies de forme et de concentration de l’hémoglobine. La protéine dans les globules rouges, qui transportent l’oxygène.
PPH : Vous avez élaboré un programme pour réduire les manifestations de la drépanocytose chez les personnes qui en sont atteintes ; Comment se nomme votre programme et pouvez-vous nous en dire un mot?
Oui en effet, j’ai créé un programme qui porte le nom charmant de : « J’Ai Dit Merde A La Drépanocytose » ! Car c’est réellement ce que j’ai décidé de faire en 2017 lorsque j’ai failli mourir en mission en pleine brousse (Piela) d’un syndrome thoracique aigue (une des complications de la drépanocytose) ! Une fois sur pieds, j’ai décidé de ne plus JAMAIS me laisser surprendre par une crise et j’ai commencé à réfléchir aux alternatives qui pouvaient m’être proposées car je ne voulais pas être mise sous hydrea – ni même sous morphine et encore moins sous antibiothérapie préventive. Pas tant que la nature et le naturel pouvaient encore m’aider. En gros, ce programme m’a permis au début de réduire mes crises de 30% – de canaliser mes pré-crises entre 30 et 50% – d’augmenter mon énergie de 30 à 50%. Aujourd’hui mes résultats sont nettement supérieurs à cela. D’ailleurs, je ne fais plus de crise ! Avec ce programme je vise le « zéro » crise en misant sur le travail physio-émotionnel ! Non seulement je coache les patients mais j’accompagne également les parents et forme les médecins à « poser un regard alternatif sur la drépanocytose ». Ce programme a pour but de faire comprendre que la drépanocytose est potentiellement mortelle mais pas forcément fatale ! Que l’on peut vivre avec elle et même envisager des projets de vie avec une VISION. Oui en travaillant sur les points de leviers qui sont à notre portés : notre mindset et notre environnement intérieur et extérieur nous pouvons déjà réduire nos crises et devenir responsable de notre santé.
PPH : Selon vous quels sont les limites des traitements actuels, proposés aux personnes atteintes de drépanocytose?
Ouf ! Je donne ma langue au chat… LOL ! Non, je vais tenter de répondre le plus honnêtement possible ! Selon moi, le traitement actuel proposé est utilisé comme « préventif » alors que nous sommes déjà dans le « palliatif ». Il y a donc là un abus de langage. Ensuite, je ne vais parler que des 2 principaux traitements : l’hydrea et l’antibiothérapie. L’hydrea n’a jamais été conçu pour soigner la drépanocytose, mais pour les cancers (leucémie…). Ce médicament est donc une chimiothérapie qui est supposé être utilisée pendant un temps relativement court. Ici on le propose comme traitement de fond à vie chez le patient atteint de la drépanocytose. En d’autres termes, on soigne une maladie génétique non cancéreuse avec des chimiothérapies orales… Quant à cette fameuse antibiothérapie, on sait tous que les antibiotiques détruisent non seulement la flore intestinale mais également le système immunitaire inné. On sait également qu’à cause de la particularité de la drépanocytose notre système de défense est déjà affaibli. Donc nous proposons d’emblée au patient malade de le placer sous antibiotiques pour le « protéger » des affections/infections tout en sachant que ce même médicament lui porte de toute façon préjudice et qu’en cas de maladie réelle et bien il aura développé une résistance aux antibiotiques. Je ne parlerais ni des transfusions – ni de la morphine… En définitif, le traitement actuel dit « préventif » n’en n’est pas vraiment un et surtout lorsque celui-ci est quasi aussi délétère sur le long terme que la maladie elle-même ! Le « traitement préventif » est en d’autres termes selon moi responsable des complications que la maladie apporte spontanément.
PPH : Qui est concerné par votre programme ?
Mon programme en le créant je l’ai imaginé pour toutes les personnes concernées : Le patient afin qu’il apprenne à se prendre en main et à actionner ses propres points de leviers. Etant moi-même atteinte de cette maladie, je sais ce qu’il peut vivre. Attention je ne suis pas dans le maternage car il y a des ancrages négatifs à faire exploser. Mon coaching s’apparente plus à de la torture qu’à une balade en bord de mer. Car c’est toute une nouvelle vision à appréhender et une toute nouvelle manière de penser à intégrer… Pour ce coaching, je suis obligé de sortir le marteau et le burin 😉 ! Etant sage-femme, j’ai aussi la capacité d’accompagner les parents. Un parent qui se sent en confiance et rassuré par rapport à ses compétences transmettra cette confiance à son enfant… qui n’aura plus peur de grandir – plus peur de vivre !Les médecins aussi, je les forme, car focalisés sur la maladie ils en oublient parfois d’intégrer la santé à l’état pure au cœur de leurs soins.
PPH : Y a-t-il des pays africains où votre programme est déjà implémenté ?
Non pas proprement dit, par contre j’ai eu à coacher des patients, bien que je préfère le terme client, du Cameroun – de Madagascar – du Burkina Faso – … D’ailleurs un directeur de polyclinique (du Burkina) devait former 4 membres de son équipe à mon programme, puis il y a eu tous les troubles de fin d’année que nous connaissons… Il faut du temps pour s’en remettre ; à cela s’est ajouté les attentats survenus récemment. Je travaille par groupe de 10 maximum.
PPH: Quels conseils donneriez-vous à un parent dont l’enfant est atteint de drépanocytose ?
Je n’ai pas de conseils clefs sur porte, car je m’appuis avant tout sur le bagage émotionnel et environnemental. En fait, ce qui va différentier ma prise en charge et celle des médecins après avoir suivi mon programme, c’est qu’on va plutôt partir du patient pour en définir la prise en charge adéquate. Ici mes conseils dépendront plus de l’âge de l’enfant – de son environnement – de l’état émotionnel de la maman (principalement car nous savons tous que les mamans sont reliées à leurs enfants par un cordon magique, celui de l’amour inconditionnel…dans la plupart des cas). Mais ce que je peux dire de manière assez générale, c’est que vos enfants atteints de la drépanocytose vont se comporter non pas par rapport à ce que vous leurs direz, mais par rapport à ce que vous pensez réellement. Par exemple : si tu dis à ton enfant « mais si, tu peux y arriver », mais qu’en fait tu es certain qu’il n’y arrivera pas, l’enfant n’y arrivera pas. Oui je sais, cela semble étrange et pourtant ce sont toutes ces subtilités-là que je transmets. La puissance de la pensée peut soit être une arme de destruction massive – soit de construction expansive. Soit ta pensée tu l’utilises contre toi – soit tu l’utilises pour toi ! C’est cela que j’apprends à mes coachés – aux parents et aux médecins.