L’OMS estime que chaque année la typhoïde touche entre 11 et 20 millions de personnes et qu’elle entraîne 128 000 à 161 000 décès. En Afrique noire, elle fait partie de l’une des causes de gastroentérite les plus fréquemment évoquées. Le Widal comme le nomme la grande majorité des populations est un examen sanguin encore couramment prescrit en Afrique. En quoi consiste le Widal ? A quelle occasion est-il prescrit ? Pourquoi sa prescription est-elle controversée ? Quelles mesures pouvez-vous prendre pour éviter de faire la fièvre typhoïde?
Avant d’aborder la question du Widal, rappelons ce qu’est la typhoïde et quel en est le germe responsable.
Qu’est-ce que la fièvre typhoïde ?
La fièvre typhoïde est une maladie infectieuse potentiellement mortelle en l’absence de traitement.
En réalité, on parle des fièvres typhoïde et para typhoïde. [1,2]
Comment appelle-t-on le germe responsable de la fièvre typhoïde ?
Les bactéries appartenant au genre Salmonella sont responsables des fièvres typhoïde et para typhoïde. Ces bactéries appartiennent soit au sérotype Typhi (plus fréquent) soit aux sérotypes Para Typhi A, B et C (moins fréquents). [2,3]
De toutes ces bactéries, Salmonella typhi est la plus répandue. Le réservoir est strictement humain, en d’autres termes on peut être porteur du germe, ne pas faire la maladie, et être à l’origine de l’infestation de nos proches. On parle de « porteur sain ».
En quoi consiste le sérodiagnostic de Widal ?
Couramment appelé Widal, le sérodiagnostic de Widal et Félix (SDWF) est basé sur un prélèvement de sang veineux. Il consiste à la recherche dans le prélèvement sanguin des anticorps anti-O et anti-H sériques.
Les anticorps de type O sont spécifiques de Salmonella typhi ou Salmonella para typhi A, B ou C ; ils apparaissent vers le 8e jour de la maladie et disparaissent en 2 à 3 mois. Un titre très élevé (> 100) témoigne d’une infection récente.
Les anticorps de type H quant à eux apparaissent vers le 10e – 12e jour et persistent plusieurs années.
S’ils sont présents en même temps que les anticorps de types O, cela signifie que l’infection est récente (encore en cours). S’ils sont détectés seuls, ils peuvent révéler une infection ancienne ou une vaccination ; Il peut également s’agir d’une infection récente avec traitement antibiotique très précoce. Chez une personne vaccinée, seule les anti H seront retrouvés dans le sang. [3]
A quelle occasion le sérodiagnostic de Widal et Félix est-il prescrit ?
Cet examen peut être prescrit si l’on suspecte une fièvre typhoïde. Parmi les éléments de suspicion, la diarrhée et la douleur abdominale sont très souvent au premier plan. Pourtant la fièvre prolongée est un signe majeur. Une constipation, des céphalées ou maux de tête, une anorexie (baisse de l’appétit), une éruption cutanée, des vomissements, une épistaxis (saignement nasal), un abattement (« tuphos » torpeur en grec) peuvent également faire l’objet d’une prescription de SDWF. [1,2]
C’est après une incubation d’environ une à trois semaines après la contamination, que survient le passage dans le sang et les symptômes cliniques. Les cas graves peuvent entraîner de sérieuses complications, voire le décès. Plusieurs organes peuvent être atteints : les intestins, le cœur, le système nerveux etc.
Pourquoi la prescription du sérodiagnostic de Widal et Félix est-elle controversée ?
L’examen de première intention pour le diagnostic des fièvres typhoïde et para typhoïde est la culture de la bactérie à partir de prélèvements biologiques (sang et selles). C’est seulement lorsque la culture n’a pas été concluante que le SDWF peut être proposé (recherche d’anticorps spécifiques de l’infection et identification de l’espèce en cause dans le sang).
Le SDWF n’est utile que pour faire le diagnostic de façon tardive. Tout simplement parce que les anticorps recherchés dans le sang mettent un certain temps avant d’apparaître.
De plus il est peu sensible (nombreux faux positifs ou faux négatifs) : une candidose peut provoquer une réaction positive, un traitement antibiotique peut fausser le résultat.[3]
Le sérodiagnostic de Widal et Félix est totalement abandonné sauf dans les pays africains.
Dans un contexte ou la règlementation de l’exercice de la médecine reste un challenge, les prescriptions inappropriées de SDWF sont légions. Le SDWF à des indications bien précises, son interprétation nécessite certaines compétences. Mal interprété ou mal utilisé, il expose les populations à une prise inutile d’antibiotique dont le corollaire est l’antibiorésistance.
Comment éviter la fièvre typhoïde ?
La fièvre typhoïde est une maladie à transmission féco-orale. Elle survient le plus souvent dans les zones où l’hygiène est précaire et frappe principalement les pays en développement.
La contamination résulte le plus souvent de l’ingestion d’eau ou d’aliments ayant subi une contamination fécale, d’origine humaine ou d’une transmission directe de personne-à-personne.
Le respect des bonnes pratiques d’hygiène et conseils suivants est la base de la prévention.
- Rendre l’eau potable (javellisation, porter l’eau à ébullition, utiliser un filtre à eau…) si on ne dispose pas d’un approvisionnement sûr en eau courante,
- Les fruits et légumes doivent être correctement lavés avant d’être consommés,
- Le lavage des mains à l’eau et au savon doit être systématique à la sortie des toilettes,
- La vaccination (en décembre 2017, l’OMS a présélectionné le 1er vaccin combiné contre la typhoïde, ce nouveau vaccin confère une immunité de plus longue durée que les anciens vaccins, nécessite moins de doses et peut être administré à partir de l’âge de 6 mois. [1,2,3]
Aujourd’hui, on isole de plus en plus de souches de salmonelles résistantes aux antibiotiques.
La vaccination contribue à réduire l’utilisation des antibiotiques et ainsi ralenti la progression de la résistance de Salmonella typhi. Le moyen de prévention le plus simple et le moins coûteux est le lavage des mains et des aliments.
Références
[1] https://www.who.int/features/qa/typhoid-fever/fr/
[2] https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/fievres-typhoide-paratyphoide
[3] http://www.doctissimo.fr/html/sante/analyses/sa_747_lloses.htm